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Les eaux revivront

  • Photo du rédacteur: Mathieu DEVRED
    Mathieu DEVRED
  • 8 févr. 2021
  • 2 min de lecture

Allez, les amis ! Laissons-le partir. Qu’il aille à sa perte. Et qu’il nous sauve. Après tout, ce n’est qu’un vieux bouc. Un pauvre bougre. Nous valons quand même bien mieux que lui. Et personne ne va le regretter. Encore moins le pleurer. Le temps va faire son œuvre. Et jouer pour nous. Bientôt, nous serons tranquilles. Enfin tranquilles.


Le supplice est cruel. L’animal s’enlise. Accablé. Le sel brûle sa chair. Il paraît absent. Un peu bête, peut-être. Regard vide. Oreilles tombantes. Bouche entre-ouverte. Mais détrompons-nous. Le vieux bouquin n’est pas si naïf. Il sait qu’on ne se débat pas avec la mort. Ce serait pire. Et son souffle s’épuise. La laine épaisse et soyeuse sera bientôt réduite en cendres. C’est presque fini. Le destin est scellé. Étendue de tout son long, une charogne ratifie le sinistre décret. Dépecée, il n’en reste rien. Rien que des os.


Funeste spectacle que cette mer désolée. Le soleil a presque disparu. Le miroir d’halite ne reflète plus les rayons, jadis éclatants. Il les a engloutis. Trop plein de lui-même, il s’est embué, terni, obscurci. Une question nous taraude. Plusieurs, même. Le Jourdain pourra-t-il rendre vie à cette vallée de malheur ? Les poissons reviendront-ils grouiller en abondance ? Depuis longtemps le blé ne pousse plus. Quelques dérisoires brindilles ont pris le relais. La vigne ne prodigue plus son vin. Elle égayait nos fêtes. Désormais, son lointain souvenir soûle nos esprits. La nostalgie nous embrouille. Le bonheur s’est échappé.


Mais il est temps de lever les yeux. Car, aujourd’hui, c’est l’Agneau qui vient. Dans cette impasse, il est le Chemin. La vie, aussi. Il a consacré l’eau du fleuve. Promesse d’Éternité. Le Royaume est là. Ici. Maintenant. Toujours neuf. Le Roi porte la couronne sanglante. Nous pensions le mettre à l’écart, le sacrifier alors qu’il s’offrait, nous rassemblait. Promis à la mort, il se consume d’amour. Regardez. Il prend le Pain. Il s’empare du Calice. Et il s’offre encore.


Qui a jamais entendu rien de tel ?

Qui a jamais vu chose pareille ?

Peut-on mettre au monde

un pays en un jour ?

Une nation est-elle enfantée en une fois ?

Pourtant, Sion, à peine en travail,

a enfanté ses fils !

Est-ce que moi,

j’ouvrirais un passage à la vie,

et je ne ferais pas enfanter ?

– dit le Seigneur.

Moi qui fais enfanter,

je fermerais le passage de la vie ?

– dit ton Dieu.

Réjouissez-vous avec Jérusalem !

Exultez en elle, vous tous qui l’aimez !

Avec elle, soyez pleins d’allégresse,

vous tous qui la pleuriez !

Car le Seigneur le déclare :

« Voici que je dirige vers elle

la paix comme un fleuve

et, comme un torrent qui déborde,

la gloire des nations. »

Vous verrez,

votre cœur sera dans l’allégresse ;

et vos os revivront comme l’herbe reverdit.

Le Seigneur fera connaître

sa puissance à ses serviteurs,

il sera indigné par ses ennemis.

(Isaïe 66, 8-10.12a.14)


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Le Bouc émissaire William Holman HUNT, 1854

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