Trouble et Certitude
- Mathieu DEVRED
- 3 juin 2020
- 2 min de lecture
Dernière mise à jour : 1 janv. 2021
Dans l’histoire, il y a parfois des accidents. Et ils ne produisent pas toujours des catastrophes. Loin de là. Pour preuve, cette œuvre inachevée. Elle nous offre un exemple troublant. L’image a près de 500 ans. Et elle nous livre des traits d’une grande modernité. Mais de quoi s’agit-il ?
À priori, une scène classique. La Vierge Marie avec l’Enfant Jésus, Élisabeth et le petit Jean-Baptiste. Deux remarquables anges dominent l’ensemble. Ils lui donnent une formidable élévation. Mais une ambiance étrange se dégage. Sûrement due au caractère incomplet du travail. Les visages sont acérés. De vastes surfaces jaunâtres envahissent les peaux. Tout cela a quelque chose de très moderne. Et d’inquiétant, aussi.
Les chérubins contemplent et chantent. Une hymne pure. Ou bien, s’effrayent et hurlent. Un cri d’angoisse. Personne ne sait. Nous sommes habitués à retrouver Élisabeth se penchant sur le Verbe fait chair. Ici, un doute nous assaille. Ne cherche-t-elle pas à s’emparer du Petit ? Pourquoi est-elle accoudée comme cela. C’est le livre des Écritures, quand même. Marie a l’air ébahie. Absorbée. Sa parente, devant nos yeux, se mue en sorcière. Squelettique. Aux doigts crochus. Comble de l’horreur, son fils semble mort. Nous pensions qu’il dormait. Mais la situation s’envenime. Jean est inerte. Bouche ouverte. Figée. Main retournée. Corps cassé. Allons-nous enfin sortir de ce cauchemar ? Trouverons-nous une issue ? Rien n’est moins sûr. Plus rien n’est certain.
Plus rien, sauf Jésus. Regardez-le. Il se dresse dans toute sa longueur. Prend appui sur le pied de la vieille femme. Son visage irradie. Il apparaît comme un feu. Dévorant. Rassurant. C’est le Sauveur. Dans ce décor funeste, il surgit. Les anges sont effarés par l’état de notre monde. Ils attestent surtout de la gloire de la Résurrection. Ils nous élèvent. Alors, laissons-nous happer. C’est une question de vie ou de mort.
La lumière brille
dans les ténèbres,
et les ténèbres
ne l’ont pas arrêtée.
Il y eut un homme
envoyé par Dieu ;
son nom était Jean.
Cet homme
n’était pas la Lumière,
mais il était là
pour rendre témoignage
à la Lumière.
Le Verbe était
la vraie Lumière,
qui éclaire tout homme
en venant dans le monde.
Il est venu chez lui,
et les siens ne l’ont pas reçu.
Et le Verbe s’est fait chair,
il a habité parmi nous,
et nous avons vu sa gloire,
la gloire
qu’il tient de son Père
comme Fils unique,
plein de grâce et de vérité.
(Jean 1, 5-6.8-9.11.14)
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Allégorie du Salut
Rosso Fiorentino, 1522

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