Une bonne Mère

Sur le perron de sa maison, elle est là. Les pèlerins ont vraiment bien fait de prendre la route. Ils la rencontrent. Enfin. Il faut bien dire que les anges ont fait le plus gros du travail. Ils ont démonté, pierre par pierre, le logis de Nazareth. Et ils l’ont reconstruit, ici. À Lorette. Ce sont peut-être les croisés qui ont eu cette initiative. Mais peu importe. Elle est là !

Et qu’elle est belle. Les pèlerins m’ont laissé une place. Je me suis donc approché. En restant à une certaine distance, quand même. C’est idiot, mais je m’attendais à quelqu’un un peu éthérée. Avec un vêtement bleu, couleur du Ciel. Et un long voile. La dame est plutôt comme nous. Un petit ruban est noué sur sa belle tresse brune. Sa robe est élégamment ouverte. Quelle femme !

Avouons que ses pieds sont plus délicats que les arpions de mes compagnons. Sa posture est plus raffinée. Mais il n’y a rien d’écrasant. Nous n’osons pas entrer, mais ce n’est pas elle qui nous en empêcherait. Bien au contraire.

À l’évidence, son garçon a sérieusement grandi. Il serait même légèrement grassouillet. Comme on dit chez nous, il vaut mieux faire envie que pitié. Le drap qui le couvre, à peine, est propre bien sûr. Toutefois, il est épais. Les bords sont effilochés. Pas franchement raffiné, tout ça ! La situation me rassure. Le petit est des nôtres. Mais pas seulement. Dans le clair-obscur de nos vies, il rayonne. Comme nous, il sort de la nuit. Cependant, notez le mince filet d’or qui nimbe sa tête. Et celle de sa mère. Nos hôtes sont couronnés de l’amour du Père. Et ils nous le portent.

Marie, c’est la Vierge, la Reine des anges, la Mère de Dieu. C’est aussi la fille d’Israël, le secours des chrétiens, la consolatrice des affligés. Notre mère.

C’est pourquoi

le Seigneur lui-même

vous donnera un signe :

Voici que la vierge est enceinte,

elle enfantera un fils,

qu’elle appellera Emmanuel -

c’est-à-dire : Dieu-avec-nous.

(Isaïe 7, 14)

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🖼 La Madone des Pèlerins

Le Caravage, 1604-1606